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Dégustation de vins immergés à 40 m de profondeur

24 April 2025 by
Dégustation de vins immergés à 40 m de profondeur
Colin Lurot

Une invitation hors du commun

Jeannette et Piotr, du Château Bon Baron à Dinant (Belgique), m’ont récemment convié à une dégustation peu ordinaire, en présence de deux amis plongeurs et d’un journaliste. Leur projet ? Observer l’évolution de vins immergés à 40 mètres de profondeur pendant 3 à 4 mois, dans une ancienne carrière à Martelange.

Passionné par les expérimentations sur l’élevage alternatif, je n’ai pas hésité une seconde. J’avais déjà dégusté un Champagne immergé durant un an (VIKKA GRAND CRU de chez Champagne Hostomme, blanc de blancs de 2009 qui a été immergé après dégorgement durant 12 mois par 60 mètres sous le niveau de la mer), mais ici, l’approche était plus expérimentale, Et surtout, l’occasion de comparer les mêmes vins en version immergée et non immergée.

Des conditions extrêmes mais naturelles

Les vins sont placés dans l’eau à :

  • 40 mètres de profondeur
  • 5 bars de pression
  • Obscurité totale
  • Température stable
  • Zéro UV
  • Mouvement d’eau naturel

Contrairement à certaines méthodes (comme les cuves immergées de Saint-Jean-de-Luz, agitées par la houle et en contact avec les lies de la Maison Egiategia), ici les bouteilles restent scellées. L’effet recherché n’est pas le bâtonnage, mais bien la pression, l’humidité, le silence et l’absence de lumière.

Les vins dégustés


Nous avons dégusté 7 vins :

  • Blancs :
    • Pinot Gris 2021
    • Chardonnay 2020
  • Effervescent :
    • Formidable Extra-Brut 2021
  • Rouges
    • Pinot Noir 2018
    • Cuvée La Grande 2018
    • Cantate Forte  
    • Acolon

Comparaison : immergés vs non immergés

1. Couleur

  • Rouges : des reflets bruns légers dans les immergés, évoquant un début de vieillissement accéléré.
  • Blancs : teintes plus dorées, passage du jaune pâle à l’or soutenu dans les immergés. 

2. Viscosité et texture 

  • Dans le verre : des larmes plus marquées, une sensation de gras inattendue pour les vins immergés. 

3. Acidité et équilibre

  • L’acidité semblait diminuée dans tous les vins immergés.
  • Cela donnait des vins plus vineux, parfois même trop ronds pour certains styles (ex : la bulle ne convenait plus en apéritif, mais se mariait parfaitement avec des plats crémés).

4. Vieillissement prématuré ?

  • En 3 mois, les différences restaient subtiles, mais réelles.
  • On imagine aisément un effet amplifié à 6 ou 12 mois.

Anecdotes et aspects techniques

Pour les vins tranquilles, les bouchons (même cirés) avaient légèrement reculé dans le goulot. Cela pose la question du type de fermeture, mais le bouchon reste le maillon faible pour l'instant. 

Pour les bulles, le verre résiste à la pression et le bouchon également. Les plongeurs nous ont partagé une réalité technique : au-delà de 6 bars, certains bouchons explosent.

Une réflexion au-delà du marketing

Certains pourraient penser que l’immersion est un effet de mode. Mais cette dégustation m’a convaincu qu’il y a un vrai sujet œnologique derrière :

  • Évolution sensorielle visible
  • Impact probable sur les équilibres chimiques (pH, acidité totale… à vérifier)
  • Intérêt pour des cuvées haut de gamme, à potentiel de garde

Conclusion : l’eau comme cave d’avenir ?

Ce moment partagé m’a inspiré. Oui, il y a encore des choses à explorer. Pourquoi ne pas aller plus loin ? Faire des analyses comparées, imaginer des parcours d’élevage hybrides, ou même plonger moi-même certaines cuvées.

Colin Lurot 

Sommelier

Dégustation de vins immergés à 40 m de profondeur
Colin Lurot 24 April 2025
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